Nous voici partis dans le vif du sujet

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs et assimilés, ce soir, Truc présente ...

Patate, Banane et poil

Il était une fois …

Imaginez. Une belle patate. Pas épluchée, ça ferait mauvais genre. Un peu germée, pour faire nature. Et imaginez maintenant cette même patate avec des bras et des jambes. En patate, évidemment. Des yeux verts, enfoncés dans un visage en patate. Et une moustache. Lisse. Aristocratique. La seule chose d'aristocratique chez cette patate d'ailleurs. Patate est rustique. Un peu maladroite, un peu timide, patate vient de la campagne.

Représentez-vous à présent cette charmante patate assise, adossée à un réverbère. Ruminant de sombres pensées. Elle s'est fait jeter par son amour. Encore un. Un amour qui est passé. Qui a cessé. Patate est triste. Patate pleure. Patate se meurt. Enfin, patate rêve de la friteuse.

Imaginez à présent ladite banane. Un port altier. Une peau jaune, sans la moindre imperfection. Mais qu'au lieu de s'affiner pour former le bout de la banane, en bas, cette peau s'évase en une robe de soirée. Belle. Une peau de soie jaune. Banane n'est pas une pouffe de bas étage. Imaginez l'élégance faite fruit. Banane est chanteuse de cabaret. Banane chante tous les soirs pour ces messieurs avinés. Banane a également une occupation moins avouable. Pour ces messieurs, elle s'effeuille. Quand le vin trouble leur jugement, quand l'alcool trouble leurs yeux, quand l'ivresse dissipe leurs belles manières, alors les plus nobles gentlemen ne sont plus que des soudards titubants et se vautrant aux pieds de la belle.

Banane chante, s'effeuille et, dès que sonne la délivrance, s'enfuit dans une chambre tapissée de rouge. Banane a un balcon, mais banane est trop fatiguée pour admirer les lumières. c'est pourtant un très beau balcon, avec vue sur le fleuve. Et devant ce balcon sommeille un lampadaire. Et au pied de cette lumière gît patate. Son teint blafard transparaît sous une moustache qui se colle de pluie et de larmes. Son petit chapeau a glissé, lui couvre les yeux. La pose parfaite de l'ivrogne en fin de nuit. Mais patate a décidé de se jeter dans la friteuse. Patate se meurt, je l'ai déjà dit.

Survient son salut. Mais elle ne le sait pas encore, évidemment. Car dans la chambre de banane entre le patron du cabaret. Félicitant la chanteuse. Félicitant la strip-teaseuse. Portant un cadeau pour l'artiste : un boa en fourrure. Le patron est riche. Le patron est moche, grand, squelettique, mais gentil. Un peu maladroit aussi. Le patron se prend d'ailleurs les pieds dans le tapis en entrant. S'étale aux pieds de la star jaune. Qui rit.

Regard gêné du patron. Un patron aux pieds d'une strip-teaseuse, c'est mal vu (quoique, depuis Pretty Woman, on tolère). Patron tend le boa. Banane le prend. Elle sait que patron n'est pas amoureux. Patron est comme ça avec toutes les filles du cabaret. C'est pour ça qu'on l'aime le patron. Le boa s'enroule autour de la belle. Il est vert (couleur donnée par un autre consultant). Un petit poil s'envole dans la pièce.

Patron va ouvrir la fenêtre, espérant que l'air frais de la nuit dissipera le rouge qui est monté à ses joues. L'air entre dans la chambre. Cueille délicatement le poil. Le ramène à l'extérieur, où il vient chatouiller le nez de patate.

Fort éternuement. Patate est rustique, on l'a dit. Un "Atchiaaah !" de la plus belle espèce. Pas un de ces petits "tchi !" de gamine de la haute. Un de ces éternuements dont on semble avoir honte. Qu'on retient, de peur de morver sur le voisin. Pas non plus un "Ah... ah ... tsssii !!", l'éternuement étouffé dans le mouchoir de soie du péteux en costard sur mesure. Là encore, la peur de se retrouver la goutte au nez devant l'autre. C'mignon, une goutte au nez pourtant.

Donc, éternuement. Mais dehors, la pluie rend le sol glissant. Et patate de s'écrouler, alors que banane attirée par le bruit passe la tête à la fenêtre. L'éclat de rire est cristallin. Patate lève des yeux ébahis. Enfin, un oeil. Patate louche très bien. Un côté pitre qu'on lui reproche parfois. Mais bouger un seul oeil est un talent de société comme un autre.

Le minois levé aux astres si misérable, tout collé de sel et trempé de pluie, qu'on a envie de le prendre pour le débarbouiller. Banane sourit. Un rayon de soleil dans la nuit. Patate sourit aussi. Chaque dentition luit sous le lampadaire. Patron est reparti en souriant sous cape.

Banane sort dans la rue (non, banane n'est pas superman, banane a simplement descendu l'escalier intérieur, passé deux ou trois portes, mais ça n'a aucun intérêt scénaristique). D'un mouvement de tête, elle cherche patate. Qui sort timidement la tête de derrière le lampadaire. Tout en se doutant qu'on voit son postérieur qui dépasse de l'autre côté. Patate sourit à nouveau. Timidement. L'astre jaune a dissipé tout songe de friteuse. On ne peut pas lui en tenir rigueur. Banane s'avance.

Patate sort de son maigre abri. Ses yeux verts renvoient la couleur du boa de banane. Celle-ci s'avance. Sa main s'avance. Saisit celle de patate. L'autre saisit une extrémité du boa, et l'enroule autour de leurs quatre épaules. Des liens qui depuis ne se sont plus brisés.

Car banane n'est plus que chanteuse. L'effeuillage, c'est fini pour elle. Patate, malgré son air rustique, est riche. Banane est désormais une vedette. Une vedette amoureuse. Amoureuse de patate. Qui lui rend bien la pareille.

Et tout ça ... grâce à un simple petit poil.



The end.

*Génèse de l'histoire*

A l'origine de cette petite historiette, trois mots. Mais laissez-moi tout expliquer.

Je pense avoir déjà mentionné mes pannes inspiratoires récurrentes. Un soir d'ennui profond, voyant trois de mes contacts msn connectés, je demandai alors 3 mots. Qui furent :

- Patate

- Banane

- Poil

Dès lors, je n'eus neurone oyant telle combinaison qui au vent de l'idée ne s'aille réveillant. Et v'là le résultat. Celui qui critique le titre ... Il aura bien raison. Mais j'aime pas les titres.

Comments

[erwan]

g le droit à des royalties, c mn idée la patate! :P

[Mulch]

Je veux le titre de fan de Patate et de Banane.

Sinon, moi j'adore trouver les titres. Mais le tiens est nul, il faut l'avouer.


Mon deeeessiiiiiin ! Mon poiiiiiil !


Bref. Voilà.